Mari, famille, carrière et argent: elle s'est "débarrassée" de tout ou presque pour vivre, sur le tard, la vie qu'elle s'est choisie. A 50 ans, l'écrivaine Constance Debré égrène dans son nouveau livre son refus des conventions et des "pensées toutes faites".
Dans la famille Debré, ne demandez pas Michel - ancien Premier ministre et père de la Ve République - ni ses fils Bernard - ex-ministre décédé en 2020 - et Jean-Louis, ex-ministre et président de l'Assemblée nationale - mais sa petite-fille, Constance, dont le dernier ouvrage "Nom" (Flammarion), est sorti début février.
Crâne rasé, veste en cuir, tatouage "plutôt crever" dans le cou: Constance Debré n'en finit pas de transgresser le monde bourgeois et conservateur dont elle est issue (et qu'elle a quitté) depuis la parution en 2018 de "Play boy", récit sur sa conversion lesbienne.
Deux ans plus tard, elle enfonçait le clou avec "Love Me Tender", où elle narre sa vie de mère privée de la garde de son fils et sa quête de se libérer de tout: fini le deux-pièces rive gauche à Paris, la robe d'avocat. C'est toute une vie qu'elle "flingue à la kalash", comme elle l'écrit.
"Mollesse"
Radicale, Constance Debré ? "Je n'ai pas à qualifier mon propre travail, ça ne m'intéresse pas, d'ailleurs dire d'un auteur qu'il est radical ne dit rien, ni de ses phrases, ni de sa pensée", balaye-t-elle dans un entretien à l'AFP.
Reste que le monde littéraire, lui, à sa petite idée sur le sujet: "transgressive", "nihiliste", "vilain petit canard d'un clan illustre", le "Lord Byron français"... Autant de qualificatifs qui "en disent long sur la mollesse et le conventionnalisme de l'époque", rétorque-t-elle, sans sourciller.
Sur la forme, "Nom" reste identique à ses précédents livres: des phrases courtes et percutantes, comme prêtes à être scandées sur une scène de rap. "L'intérêt pour moi de la littérature, c'est développer une pensée qui soit très précise et incarnée (...) C'est pour ça que j'emploie un vocabulaire simple, et des phrases courtes", explique-t-elle.
Et toujours une narration à la première personne, même si elle refuse le terme d'autofiction: "Le genre, en littérature comme ailleurs, m'intéresse peu", insiste-t-elle. Sans jamais perdre patience, l'écrivaine réfute, conteste, tente de démonter les questions posées par l'AFP. Un entretien qui prend, par moment, les allures d'une "battle" de hip-hop.
"Dire non"
Sur la forme, l'autrice poursuit son exploration de la liberté, thème omniprésent de son oeuvre littéraire. A la différence que "Nom" - qui résonne aussi comme une négation - ressemble à un manifeste. Un manifeste contre l'héritage, l'autorité parentale, l'enfance, la famille... Un appel à "dire non" à une vie toute tracée, faite "de pensées toutes faites", explique-t-elle.
"Faire le pari qu'on est autre chose que son enfance et ses parents, c'est déjà le devenir (...) Et je trouve que ce pari vaut le coup, je pense que c'est notre devoir de parier que notre existence est la nôtre, entièrement, avec ce que ça a de vertigineux, et de tragique".
Un peu à sa manière, elle qui a refusé d'être l'"héritière" de son clan pour se choisir une vie différente, mais entièrement la sienne. Pas là pour donner des leçons, l'autrice reconnait qu'un tel cheminement est "très difficile", même si elle peut compter sur le soutien d'amis aisés.
Reste que les lecteurs s'y retrouvent. A chaque sortie, ses livres sont des succès. Sur les éditions poche de "Love Me Tender" et "Play boy", un sticker prévient: "COUP de POING: Une lecture dont vous ne sortirez pas indemne". "Coup de poing ? Encore une expression toute faite", déplore l'écrivaine, "pas là pour mettre des coups de poing". Et d'ajouter que "(...) si les lecteurs s'y reconnaissent, s'ils se disent que cette vie qui n'est pas la leur parle d'eux, alors c'est réussi".
Rédaction avec AFP
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