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 Le Cantique des cantiques engagé d'Abou Lagraa à Chaillot - Danse 
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Le Cantique des cantiques engagé d'Abou Lagraa à Chaillot
 

L'image de la femme, le fanatisme religieux, l'homosexualité: le chorégraphe Abou Lagraa et le metteur en scène Mikaël Serre donnent une interprétation libre et "engagée" du "Cantiques des cantiques", au Théâtre national de Chaillot jusqu'au 3 décembre.

 
 
 
 

"On a voulu rattacher le +Cantique des cantiques+ aux problématiques d'aujourd'hui", dit Abou Lagraa lors d'un entretien avec l'AFP. "C'est engagé, ce n'était pas intéressant de faire la métaphore que le 'Cantique' fait déjà", insiste le chorégraphe de 45 ans.

Cette suite de poèmes de l'Ancien Testament, écrite il y a plus de 2.500 ans, raconte le mariage et les rapports amoureux, de manière métaphorique, entre la Sulhamite (la bien-aimée) et un roi.

Le texte est dit, parfois dansé, par deux actrices Gaia Saitta et Maya Vignando, entourées de six danseurs. "Avec Mikaël Serre nous avions envie de donner davantage la parole aux femmes", dit le chorégraphe. "L'homme avait très peur de la femme, de son corps, de ce que cela provoquait en lui."

Pour la première fois Abou Lagraa s'est appuyé sur un texte existant et le transforme profondément avec l'aide du metteur en scène et comédien Mikaël Serre. "Un metteur en scène et un chorégraphe c'est antinomique. Un metteur en scène part d'un texte, un chorégraphe d'abstractions." "On s'était dit que ce serait intéressant que ce soient deux femmes qui incarnent l'homme et de la femme pour n'avoir qu'une parole féminine", dit encore Lagraa.

Les danseurs expriment dans des duos charnels, très sensuels, ce que devraient être les rapports amoureux. "On essaye d'être éducatif, d'expliquer aux hommes que les femmes ne sont pas des objets qu'on prend et qu'on 'baise'", explique le chorégraphe. "Il y a plusieurs duos d'amour dans ce spectacle, il y a le duo d'amour idéal, le duo rêvé, et il y aussi la solitude et la souffrance", précise t-il.

Daech détruit le Cantique

Pour le chorégraphe d'origine algérienne, le fanatisme religieux aujourd'hui constitue une véritable négation de cet érotisme. "Daech détruit aujourd'hui ce Cantique des cantiques, Daech détruit toute cette symbolique, ces statues d'hommes et de femmes sensuelles et érotiques", souligne-t-il.

Musulman, Abou Lagraa a choisi ce détour par un texte qui vient de la Bible et de la Torah pour parler du fanatisme d'aujourd'hui. Des images des bombardements de villes syriennes sont projetées "pendant que quelqu'un prie et pendant que quelqu'un fait la fête", explique-t-il. Un duo d'amour d'une sensualité troublante est dansé au coeur du spectacle, "pour dire que l'amour existe encore heureusement".

Le spectacle touche aussi à la question de l'homophobie, montrant un des danseurs recevant un crachat. "Moi qui suis du monde arabe j'ai vu des choses qui m'ont complètement choqué", dit à ce propos le chorégraphe. "Des homosexuels sont jetés des falaises par Daech, en Egypte on les enferme, les torture et parfois on les tue. Il y a un an et demi j'ai vu à Fez un homosexuel se faire lapider en pleine rue", dit avec émotion le créateur d'"El Djoudour" (Les racines, 2013).

"C'est cash. Ce spectacle pose question, on n'en sort pas indemne. C'est la première fois que je m'engage dans un spectacle comme ça et c'est la dernière fois", affirme-t-il Abou Lagraa.

(Source AFP)


 
   
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